La Poupée Ratée

2012/02/05, dimanche

La veille de la première neige à Meudon, j’ai raté ma cinquième poupée en tissus, d’inspiration Waldorf. Elle avait déjà les traits de visage en brouillon, dessinés avec mon feutre "Trick Marker" qui s’effaceraient automatiquement dans quelques heures ou quelques jours. Je la regardais dans les yeux, que faire? La poubelle ? Ses bras à moitié cousus pendant sur le rebord d’une chaise pour enfant, le tronc rempli seulement au niveau du ventre, avec le thorax creusé comme une vieille malade atteinte de la pneumonie.

Elle me regardait  de retour : ne m’abandonne pas, je t’en supplie ! Je cherchais alors une solution.
J’avais prévu une poupée de 40 centimètres en essayant une nouvelle technique pour le corps : les bras fixés à la racine de la tête, sur la sous-couche du cou, le tronc et les jambes en une seule pièce. Je m’appliquais sur mes patrons, y mettant les points positifs obtenus des quatre premières réalisations : la longueur des jambes et des bras, les rondeurs....

Le modelage de la tête déjà terminé. La différence entre la forme de la sous-tête et celle enveloppée de la peau me surprennait toujours : ce n’était plus la même chose. Avec une baguette en bambou glissée sous le jersey, je m’efforçais à pousser de l’ouate vers les joues - ils se sont affaissés sous le jersey bien tendu.  

J’ai mis la tête à sa place avec les pièces du corps coupées dans le jersey étalées en forme de poupée finie sur la table... Mais la tête était sensiblement d’une taille au-dessus ! Comment est-ce possible ! Que faire? Laisser la tête de côté pour une fabrication ultérieure ? Modifier les patrons et recommencer à zéro ? Mais une fois rembourrée et cousue, en jouant sur l’élasticité du jersey, la poupée pourrait avoir une proportion acceptable, en tout cas c’était ce que je pensais, d'ailleurs j’avais du mal à  accepter l’échec à cette stade. Je continuais alors comme si de rien n’était, et j’ai eu tort.

Le lendemain de cet échec inattendu, je me suis réveillée avec le jardin sous un magnifique manteau blanc. Mon chat sortait quand même, affronter la première neige de sa vie avec la fougue de ses neuf mois. La blancheur éclatante de la neige m'a donné une idée comme un éclair jailli dans le cerveaux. Je vais finir la couture des épaules qui enveloppe les bras de la poupée, défaire la couture au ras des jambes, les couper et lier sur une sorte de culotte en ajoutant quelques centimètres de plus, ensuite monter sur la partie supérieure du tronc. J’aurai ainsi la taille qu’il fallait.